Alexandre Martini : « Faire de la santé un moyen de prévenir la précarité »
Officiellement créée par décret en décembre dernier, la Fondation hospitalière pour la recherche sur la précarité et l’exclusion sociale a tenu son conseil d’administration d’installation le 8 juillet.
Son directeur, Alexandre Martini, revient sur l’ambition de cette nouvelle structure initiée par le Centre d’accueil et de soins hospitaliers (Cash) de Nanterre.
Actualités sociales hebdomadaires : Comment est née la Fondation hospitalière pour la recherche sur la précarité et l’exclusion sociale ?
Alexandre Martini : En France, il n’y a que deux fondations hospitalières de recherche, il s’agit d’un statut rare. Ce n’est pas un hasard si cette fondation a été créée par le Centre d’accueil et de soins hospitaliers (CASH) de Nanterre. C’est un établissement dont la vocation sociale est historique. D’une part, parce qu’il y a un pôle de médecine sociale très développé, avec de nombreux services dédiés aux personnes sans domicile. Ce pôle est une émanation de ce qui était, au XIXe siècle, la prison de Nanterre. Et, d’autre part, parce que les services classiques de l’hôpital sont fréquentés par une patientèle très précaire. L’activité de l’établissement est empreinte d’une dimension sociale en raison de son ancrage dans un territoire populaire.
ASH : Quelles vont être les missions de cet organisme ?
A. M : Grâce à cette fondation, nous voulons faire de la santé un moyen de prévenir la précarité, d’empêcher le décrochage social et, idéalement, de favoriser la réinsertion. L’idée est de comprendre pour mieux prendre soin. Notre démarche vise à identifier les profils et les parcours de soin des populations précaires : les sans-domicile, mais aussi les travailleurs pauvres, les femmes victimes de violences, les personnes en situation de handicap, les jeunes en difficulté… Conjointement, nous allons mener des recherches sur les actions du secteur social et médico-social pour pouvoir les mesurer, les quantifier, les argumenter et les valider. L’idée est d’en tirer des modèles à pérenniser au sein des structures qui les mettent en place ou à répliquer dans d’autres associations. Aujourd’hui, les actions qui fonctionnent ne sont pas suffisamment documentées et peinent à trouver leur place dans l’arsenal des politiques publiques. Nous ne sommes pas un observatoire mais un accélérateur de solutions.
ASH : Avez-vous commencé à mener des recherches ?
A. M. : Un conseil scientifique est en cours de constitution. Il aura pour rôle d’identifier les problématiques sur lesquelles nous travaillerons et fonctionnera certainement avec des appels à projets sur nos thématiques. En attendant, des premiers partenariats ont été noués. Avec le Samu social de Paris, par exemple, nous allons étudier l’accès aux soins primaires des personnes sans domicile, faire une typographie des profils et des besoins de ces publics. Nous voulons comprendre comment ces personnes accèdent à l’offre de soins primaires, quel est leur parcours. Nous avons aussi des demandes entrantes de la part de potentiels financeurs comme l’agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France ou le conseil régional, qui souhaitent savoir comment ils pourraient se mobiliser sur ces thématiques. La Fondation a vocation à mener des projets à l’échelle nationale. Ceux-ci seront multicentriques, c’est-à-dire effectués sur différents lieux pour disposer d’éléments de comparaison entre les situations urbaines et celles des zones rurales, où les problématiques sont différentes mais tout aussi importantes.
• Propos recueillis par Marie Nahmias